Beaucoup de questions

Ces bénévoles à l’heure du choix !

« Dois-je poursuivre mon bénévolat ? Ou rester chez moi pour respecter des consignes de confinement, me protéger, ma famille et mon entourage, plus encore, en appliquant les « mesures barrières ». C’est un choix auquel de nombreuses personnes bénévoles ont été confrontées ces dernières semaines, encore aujourd’hui !

Une situation inédite, mais un problème récurrent quand nous parlons des limites de l’engagement !

Nombreux sont les citoyens font du bénévolat auprès des personnes les plus vulnérables, et force est de constater à ce jour, que nombre des actions à destination de ces publics ont été mises en suspend ou réduites faute de bénévoles, notamment, pour assurer ces missions, à défaut de garanties en termes de sécurité : maraudes, distributions alimentaires, ouverture de lieux d’accueil, accès aux soins, écoute et soutien psychologique… Des missions qui visent pourtant à préserver les droits fondamentaux de ces publics les plus « vulnérables ». Des droits fondamentaux déjà mis à mal en « temps normal », alors qu’en est-il aujourd’hui ? Il n’y a qu’à lire les différentes tribunes dans la presse qui essaient d’alerter sur l’urgence que représente la prise en charge de ces différents publics… En témoignent ces appels à solidarité, ou ces chaînes de solidarité qui se mettent en place – mais encore une fois auxquels tout le monde ne pourra/ ne voudra s’associer au regard de cette question de « sécurité » qui ne saurait être garantie en l’état actuel des choses.

Alors, que j’écrivais il y a peu un article sur la responsabilité sociale, ici « sociétale », des organisations associatives et notamment sur l’accompagnement des bénévoles, nous avons assisté dans cette situation exceptionnelle à l’expression même de cette responsabilité dès lors que nombre d’entre elles, ont relayé les messages de prévention et mis en suspend tout ou partie de leur activité par manque de bénévoles, et ce malgré le « vide » que cela allait créer.

L’autre pan de leur responsabilité sociale étant l’action envers ces publics les plus vulnérables, leur rôle d’alerte et une autre forme de mobilisation s’est donc mise en place a minima pour que les institutions prennent le relais ou apportent un soutien face à cette autre crise et ces « victimes collatérales » en permettant l’action des acteurs associatif en toute sécurité ou à moindre risque dirons-nous…

Mais ce qui est le cœur de mon propos là, est que dans cet article, j’écrivais donc en ces termes:

« Il est de la responsabilité sociale des associations d’investir la « pause bénévole » en ce qu’il s’agit d’un levier pour rétablir les capacités individuelles et collectives de toutes les personnes qui croisent leur chemin de façon ponctuelle ou pérenne. Car s’exerce en théorie, en leur sein, une vie démocratique, un (ré)apprentissage informel par exemple de la diversité, le débat d’idées, le partage, le tout imprégné de valeurs communes, notamment de solidarité, de fraternité pour d’autres, le respects et l’écoute… la liste se veut non exhaustive ! »

Et toutes ces valeurs pousseraient naturellement les bénévoles engagés, ici au risque de les placer dans une difficulté quel que soit le choix qu’ils fassent ! Et quoique fasse une association pour se préserver de la tentation forte de jouer la fibre solidaire pour pousser à s’engager au-delà des risques dans de pareilles circonstances, ce « bagage engagé » place le bénévole, à l’heure du choix – celui non-dit de la limite de son engagement et de peser « le pour et le contre » – dans une situation difficile, désespérante et solitaire au niveau psychologique !

Au moment du confinement avec tout ce temps propice à la réflexion, (qui pourrait parfois d’ailleurs donner le sentiment d’inutilité sociale à rester chez soi), une telle situation peut devenir l’heure du « grand déballage » et réveiller tous les fondamentaux, tous les antagonismes, toutes les crispations et les injustices que l’on apprend, constate et vit, et que l’on enferme, parfois au plus profond de soi avec toutes ces valeurs que l’on essaie de défendre. Un dur moment d’introspection !

L’heure du choix devient ce grand écart émotionnel qui nous pousse à une certaine « schizophrénie » au quotidien.

Transposez cela à tous les espaces de vie, et toutes les situations du quotidien, au travail, dans la rue… où se joue ce combat intérieur et où l’on réajuste jour après jour sa relation parfois trop fonctionnelle au monde, voire sa part d’humanité et son côté fraternel en dépit de ses émotions… A mon sens, une part du stress de nos quotidiens se joue dans cette accumulation et pourrait expliquer pour partie les détresses psychologiques auxquelles nombres d’entre nous sont confrontés à une période de nos vies – un pan de nos charges mentales !

Alors ce choix, qui laissera forcément « quelqu’un derrière », je le pense sincèrement ne doit pas appartenir à un bénévole, car ce choix est épuisant émotionnellement et ce bénévolat peut être dur ! A plus long terme, cette situation qui rejaillira sur la perception même de la démarche associative et de ses limites, tout comme les limites des institutions. Une perception qui en toile de fond aura un impact sur l’idée même que l’on se fait du contrat social… Or dans ce même article et d’autres, j’écrivais à tort ou à raison, que le bénévolat participe de la redéfinition du contrat social qui, on le voit depuis quelque temps, est plus que mis à mal. Et c’est là que j’insiste sur ce choix ne devrait pas être celui d’un bénévole, individuellement mais être porté collectivement.

C’est notre contrat social qui est en jeu ! Ce choix appartient à la société toute entière.

Ces situations, il y en a malheureusement régulièrement (et pas qu’en temps de crise). En ces heures où tant de monde se projette sur le « jour d’après », j’oserai dire que l’on est tous un peu bénévoles de la plus grande association de France – voire du monde en tant que citoyens du monde : cette société civile dont on parle si souvent.  Une société civile que l’on retrouve à tous les niveaux de la société et dans tous les « espaces de vie ». De là à dire que nous avons tous le pouvoir d’agir, individuellement, ensemble…

Allez, demain alors, notre rôle, sera a minima de participer au changement, à chacun de prendre le temps de penser le « comment » ! Car, bien que l’on puisse avoir pour beaucoup l’impression – au-delà de respecter le confinement – de ne pas être utile en ces temps de crise sanitaire car d’autres sont sur le « front », la distanciation sociale et ses conséquences socio économiques ne montrent qu’une seule chose : nos interactions sociales sont si importantes qu’elles font « tourner le monde ». La crise actuelle éclaire des relations (parfois) trop fonctionnelles au monde sur lesquelles nous mettons aujourd’hui des millions de visages que nous ne croisons plus dans les rues. Nous serons toutes et tous ensembles, le changement !

C’est bel et bien cet esprit de #cooportunité qui ne demande qu’à souffler sur les fondements de notre société en replaçant chaque citoyen au cœur de la mêlée !

Daniel RENAMBATZ

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