DE(COD)EXION FORCÉE !

On a déjà évoqué à plusieurs reprise le terme de #cooportunité, néologisme qui s’appuie sur les esprits d’opportunité et de coopération. Une façon ici de matérialiser un état d’esprit et une dynamique, qui sous-tend, de mon point de vue, l’engagement dans une acceptation très large! Notamment celle de la participation au #VivreEnsemble, et au #ConstruireEnsemble ! Une démarche et une dynamique en toile de fond de nos vies et qui s’exprime dans tous les espaces de vie ! Une façon encore de mettre en avant cet engagement politique au sen noble du terme – la participation à la vie de la Cité – et toutes ces capacités individuelles et collectives en œuvre au quotidien, sans que l’on ne s’en rende forcément compte.

Une dynamique à relire dans cette approche au regard de trois étapes fondamentales : dé(COD)exion, (RECO)nnexion, et enfin de façon plus globale, la participation citoyenne. Déconstruire les codes, et se reconnecter notamment par cette reconnaissance de ce que chacun apporte dans les interactions sociales…

Une démarche évolutive – individuelle et collective – qui s’inscrit tout au long de la vie des citoyens que nous sommes, à des temporalités différentes, dans tous ces espaces de vies traversés, dès l’enfance, jusqu’à sa mort.

Une dynamique perpétuelle qui part d’un postulat : tout le monde ne peut être disposé au même instant au même « effort » de participation, car cette dynamique s’inscrit dans un « écosystème » et des « cadres de références » intégrant les dimensions sociales, psychologiques et environnementales. La « charge mentale » et les rythmes ne peuvent être les mêmes pour toutes et tous, à l’instant T.

Pour autant, les interactions sociales, elles, doivent permettent la complémentarité, la compensation et in fine, « l’équilibre ». Coexistent donc des citoyens aux capacités individuelles d’engagement différentes, évolutives et compensées, dans la théorie, par des capacités collectives. La capacité d’agir est plus ou moins développée au niveau individuel, à telle ou telle période de la vie, pour telle ou telle personne. L’inscription dans le collectif a tendance d’ailleurs parfois, à noyer l’information dans la masse, ne rendant pas ce rôle pour autant inutile…

La cooportunité traduit donc aussi cette implication au quotidien, qui nous échappe, invisible, car nous sommes pris par le temps, les rythmes, et inondés de « messages » parfois contradictoires. Une implication pour la vie de la Cité qui est souvent minimisée alors que tout un chacun y participe par les simples interactions sociales (positives et négatives) qu’il a dès sa naissance, jusqu’à sa mort, quotidiennement (et machinalement). Certes, l’urgence et/ou l’actualité amène certains à jouer un rôle plus actif à l’instant T : un hommage s’impose ici pour toutes celles et ceux qui auront œuvré récamment  en pleine lumière et qui pourtant ne l’étaient pour certains que très rarement, voire jamais pour d’autres!

Mais ne l’oublions pas : tous, nous participons à la « grande mécanique du monde » !

Quiconque dira le contraire n’aura qu’à « apprécier » le vide laissé par le confinement… Une façon de remettre en lumière la somme de toutes ces interactions sociales, et économiques qui portent notre société toute entière.

La cooportunité, c’est aussi conscientiser, (re)prendre & renforcer sa capacité à agir à son niveau – « là où l’on est acteur », et non pas uniquement spectateur ! Je parle souvent du #bénévolat et de la #PauseBénévole, car c’est mon angle d’approche, mon métier, mais je pense à tout le monde et toutes ces individualités qui fondent le collectif, avec ses imperfections mais aussi sa faculté à compenser, à contrebalancer, à réagir, à AGIR !

Bref, tout cela pour en arriver à là : je pense que nous sommes aujourd’hui individuellement et collectivement (un peu à marche forcée) entrés dans cette phase de dé(COD)exion – imposée et peut être même accélérée vue la disponibilité que nous avons eu a priori lors du confinement 👉 et je vous invite à lire mon article sur le sujetVoire une amorce de (RECO)nnexion : il n’y a qu’à voir toute ces dynamiques citoyennes, ces engagements qui naissent, ces débats qui s’amorcent, ces volontés de faire autrement.

Au-delà des paroles, et de ces actes, un acquis certains pour demain, nombre d’entre nous pourrons redonner du sens à ces quotidiens liés ! Pour quelle participation citoyenne demain ? L’avenir nous le dira…

Daniel RENAMBATZ

Ces bénévoles à l’heure du choix !

« Dois-je poursuivre mon bénévolat ? Ou rester chez moi pour respecter des consignes de confinement, me protéger, ma famille et mon entourage, plus encore, en appliquant les « mesures barrières ». C’est un choix auquel de nombreuses personnes bénévoles ont été confrontées ces dernières semaines, encore aujourd’hui !

Une situation inédite, mais un problème récurrent quand nous parlons des limites de l’engagement !

Nombreux sont les citoyens font du bénévolat auprès des personnes les plus vulnérables, et force est de constater à ce jour, que nombre des actions à destination de ces publics ont été mises en suspend ou réduites faute de bénévoles, notamment, pour assurer ces missions, à défaut de garanties en termes de sécurité : maraudes, distributions alimentaires, ouverture de lieux d’accueil, accès aux soins, écoute et soutien psychologique… Des missions qui visent pourtant à préserver les droits fondamentaux de ces publics les plus « vulnérables ». Des droits fondamentaux déjà mis à mal en « temps normal », alors qu’en est-il aujourd’hui ? Il n’y a qu’à lire les différentes tribunes dans la presse qui essaient d’alerter sur l’urgence que représente la prise en charge de ces différents publics… En témoignent ces appels à solidarité, ou ces chaînes de solidarité qui se mettent en place – mais encore une fois auxquels tout le monde ne pourra/ ne voudra s’associer au regard de cette question de « sécurité » qui ne saurait être garantie en l’état actuel des choses.

Alors, que j’écrivais il y a peu un article sur la responsabilité sociale, ici « sociétale », des organisations associatives et notamment sur l’accompagnement des bénévoles, nous avons assisté dans cette situation exceptionnelle à l’expression même de cette responsabilité dès lors que nombre d’entre elles, ont relayé les messages de prévention et mis en suspend tout ou partie de leur activité par manque de bénévoles, et ce malgré le « vide » que cela allait créer.

L’autre pan de leur responsabilité sociale étant l’action envers ces publics les plus vulnérables, leur rôle d’alerte et une autre forme de mobilisation s’est donc mise en place a minima pour que les institutions prennent le relais ou apportent un soutien face à cette autre crise et ces « victimes collatérales » en permettant l’action des acteurs associatif en toute sécurité ou à moindre risque dirons-nous…

Mais ce qui est le cœur de mon propos là, est que dans cet article, j’écrivais donc en ces termes:

« Il est de la responsabilité sociale des associations d’investir la « pause bénévole » en ce qu’il s’agit d’un levier pour rétablir les capacités individuelles et collectives de toutes les personnes qui croisent leur chemin de façon ponctuelle ou pérenne. Car s’exerce en théorie, en leur sein, une vie démocratique, un (ré)apprentissage informel par exemple de la diversité, le débat d’idées, le partage, le tout imprégné de valeurs communes, notamment de solidarité, de fraternité pour d’autres, le respects et l’écoute… la liste se veut non exhaustive ! »

Et toutes ces valeurs pousseraient naturellement les bénévoles engagés, ici au risque de les placer dans une difficulté quel que soit le choix qu’ils fassent ! Et quoique fasse une association pour se préserver de la tentation forte de jouer la fibre solidaire pour pousser à s’engager au-delà des risques dans de pareilles circonstances, ce « bagage engagé » place le bénévole, à l’heure du choix – celui non-dit de la limite de son engagement et de peser « le pour et le contre » – dans une situation difficile, désespérante et solitaire au niveau psychologique !

Au moment du confinement avec tout ce temps propice à la réflexion, (qui pourrait parfois d’ailleurs donner le sentiment d’inutilité sociale à rester chez soi), une telle situation peut devenir l’heure du « grand déballage » et réveiller tous les fondamentaux, tous les antagonismes, toutes les crispations et les injustices que l’on apprend, constate et vit, et que l’on enferme, parfois au plus profond de soi avec toutes ces valeurs que l’on essaie de défendre. Un dur moment d’introspection !

L’heure du choix devient ce grand écart émotionnel qui nous pousse à une certaine « schizophrénie » au quotidien.

Transposez cela à tous les espaces de vie, et toutes les situations du quotidien, au travail, dans la rue… où se joue ce combat intérieur et où l’on réajuste jour après jour sa relation parfois trop fonctionnelle au monde, voire sa part d’humanité et son côté fraternel en dépit de ses émotions… A mon sens, une part du stress de nos quotidiens se joue dans cette accumulation et pourrait expliquer pour partie les détresses psychologiques auxquelles nombres d’entre nous sont confrontés à une période de nos vies – un pan de nos charges mentales !

Alors ce choix, qui laissera forcément « quelqu’un derrière », je le pense sincèrement ne doit pas appartenir à un bénévole, car ce choix est épuisant émotionnellement et ce bénévolat peut être dur ! A plus long terme, cette situation qui rejaillira sur la perception même de la démarche associative et de ses limites, tout comme les limites des institutions. Une perception qui en toile de fond aura un impact sur l’idée même que l’on se fait du contrat social… Or dans ce même article et d’autres, j’écrivais à tort ou à raison, que le bénévolat participe de la redéfinition du contrat social qui, on le voit depuis quelque temps, est plus que mis à mal. Et c’est là que j’insiste sur ce choix ne devrait pas être celui d’un bénévole, individuellement mais être porté collectivement.

C’est notre contrat social qui est en jeu ! Ce choix appartient à la société toute entière.

Ces situations, il y en a malheureusement régulièrement (et pas qu’en temps de crise). En ces heures où tant de monde se projette sur le « jour d’après », j’oserai dire que l’on est tous un peu bénévoles de la plus grande association de France – voire du monde en tant que citoyens du monde : cette société civile dont on parle si souvent.  Une société civile que l’on retrouve à tous les niveaux de la société et dans tous les « espaces de vie ». De là à dire que nous avons tous le pouvoir d’agir, individuellement, ensemble…

Allez, demain alors, notre rôle, sera a minima de participer au changement, à chacun de prendre le temps de penser le « comment » ! Car, bien que l’on puisse avoir pour beaucoup l’impression – au-delà de respecter le confinement – de ne pas être utile en ces temps de crise sanitaire car d’autres sont sur le « front », la distanciation sociale et ses conséquences socio économiques ne montrent qu’une seule chose : nos interactions sociales sont si importantes qu’elles font « tourner le monde ». La crise actuelle éclaire des relations (parfois) trop fonctionnelles au monde sur lesquelles nous mettons aujourd’hui des millions de visages que nous ne croisons plus dans les rues. Nous serons toutes et tous ensembles, le changement !

C’est bel et bien cet esprit de #cooportunité qui ne demande qu’à souffler sur les fondements de notre société en replaçant chaque citoyen au cœur de la mêlée !

Daniel RENAMBATZ